4 Octobre 2003
Alors que nous venons juste de célébrer les 20 ans des tragiques évènements d’Octobre 1988, évènements qui ont permis d’arracher dans les larmes et le sang le droit de s’exprimer, de s’informer grâce une presse indépendante, de fonder des partis et des associations, l’Algérie en est encore à se débattre avec les fantômes du passé et leurs méthodes violentes et arbitraires destinées à infliger leur personne à la Nation.
L’objet de la révision de la Constitution de 1996 est de plonger l’Algérie, doucement mais sûrement, dans une longue nuit dictatoriale alors que de part le monde le despotisme est en constante régression.
A. Bouteflika vient en effet de mettre à exécution son projet de modification de la Constitution pour s’octroyer une présidence à vie et balayer ainsi l’ultime rempart constitutionnel qui en théorie pouvait encore assurer au pays l’alternance au pouvoir.
Après avoir usé et abusé de toute la panoplie des manœuvres visant à usurper l’expression libre des citoyens, voici venu le temps de constitutionnaliser le despotisme et son corollaire le culte de la personnalité.
Le trucage des élections, l’effacement méthodique de toute vie politique pluraliste, la confiscation des médias publics, l’intimidation et même l’incarcération de toute voix libre, ne suffisent plus à un système arrivé à bout de souffle dans sa logique de maintien au pouvoir à des fins purement personnelles.
A 71 ans et dans un état de santé précaire, A. Bouteflika a encore beaucoup d’ambition, non pour son pays et son peuple, mais pour sa propre personne, lui qui n’a d’autre projet que de prolonger son aventure dictatoriale et dont le bilan se solde déjà par l’émergence de nouveaux phénomènes, les harragas et les kamikazes, signes du profond désespoir qui s’est emparé de la jeunesse algérienne, sans parler de l’accentuation du chômage, de la pauvreté et de la corruption.
Les Algériens ne sont pas dupes de la finalité réelle et des enjeux véritables de cette révision constitutionnelle qui se déroule ainsi en catimini, hors approbation populaire.
Cette nouvelle expédition contre la démocratie et les libertés n’est qu’une étape de plus dans la longue marche vers le despotisme inaugurée il y a une dizaine d’années avec la désignation de A Bouteflika à la tête de l’Etat. Jamais, en effet, durant ces vingt dernières années, les libertés n’ont été à ce point menacées que ces dix dernières années. Aucune institution, aucun parti, aucune association, aucun journal indépendant, aucun journaliste, aucune voix libre, n’a pu échapper aux coups de butoir pour intimider et/ou faire taire toute opposition. Même le consensus auquel est parvenu la nation après une décennie de violence terroriste connaît des velléités de remise en cause par la promotion des acteurs du drame de la décennie noire.
Pour l’Association Forum Démocratique l’heure est particulièrement grave. Un véritable processus de destruction et de remise en cause des libertés est en cours et risque de catapulter l’Algérie dans une longue nuit dictatoriale dont elle n’en sortira pas indemne.
Cette ultime violence annonciatrice de nouvelles atteintes à la souveraineté populaire nous interpelle gravement car elle a pour objectif stratégique de bloquer tout avènement d’une véritable alternative à un système de pensée et de " gouvernance " finissant, largement discrédité, coupé du peuple et farouchement hostile à toute idée de démocratie, de libertés, de droits de l’homme et de promotion du citoyen.
Elle en appelle solennellement à la conscience des Algériennes et des Algériens afin qu’ils ne se résignent pas à cette fatalité et n’abdiquent pas leur avenir car se serait la manière la plus sûre d'exposer notre pays à d'autres aventures. Plus que jamais, l’heure est à l’engagement pour sauver l’Algérie du despotisme, préserver et renforcer les acquis démocratiques, les libertés et les fondements républicains gravement menacés.
L’Association Forum Démocratique, dont le but est de promouvoir et de défendre la démocratie et les libertés en Algérie, en appelle à la conscience des Algériennes et des Algériens afin qu’ils s’engagent massivement à sauver l’Algérie du despotisme, préserver et renforcer les acquis démocratiques, les libertés et les fondements républicains, sans lesquels l’Algérie ne pourra engager les grandes réformes destinées, notamment, à amorcer son développement économique, attirer l’investissement étranger créateur d’emploi, juguler le chômage de la jeunesse en priorité et assurer une justice sociale.
Naturellement interpellée par toutes ces épreuves qui touchent tous ceux qui refusent d’abdiquer devant ce qui s’apparente à une logique de coup d’état permanent, l’Association Forum Démocratique en appelle au regroupement des forces de progrès pour relever le défi de l’Algérie du 3ème millénaire qui est d’imposer une alternative crédible et démocratique à ce régime honni.
Paris , le 05/10/03
